Des perspectives rémunératrices pour l’industrie du recyclage
En juillet, la Commission européenne a proposé une nouvelle directive sur les véhicules hors d’usage. Elle remplacera les anciennes règles par une approche plus globale prenant en compte l’ensemble du cycle de vie. Lors de sa dernière conférence européenne sur le recyclage, EuRIC a accordé une place centrale à ce sujet. Mattia Pellegrini est venu expliquer les lignes directrices de la nouvelle proposition. Celle-ci doit toutefois encore être approuvée par le Parlement européen. Il est donc toujours possible de la peaufiner.
Le pacte vert pour l’Europe identifie le secteur automobile comme l’une des sept chaînes de valeur clés de son plan d’action pour l’économie circulaire. En regroupant dans un nouveau paquet la législation sur les véhicules hors d’usage (VHU) et les directives concernant la réutilisation, le recyclage et la valorisation des véhicules (3RTA), l’idée est d’atteindre trois objectifs : des changements dans la conception, un recyclage de meilleure qualité et une utilisation accrue de produits recyclés dans les nouvelles voitures. Évoquons tout d’abord les chiffres. La proposition élaborée par la Commission européenne comporte 56 articles, 11 annexes, et 17 actes relatifs à la mise en œuvre et à la délégation, ainsi qu’une évaluation d’impact et trois études de soutien. Une synergie a également été recherchée avec la proposition d’acte sur les matières premières critiques et les directives sur les batteries. Si vous souhaitez approfondir le sujet, les documents à consulter sont donc nombreux.
La première grande nouveauté est l’élargissement du nombre de véhicules couverts par les nouvelles règles. Peu à peu, les motos, les petits et grands autobus, les camions légers et les poids lourds, de même que les remorques devront à leur tour s’y conformer.
Pour améliorer la conception circulaire de tous ces véhicules, la Commission européenne propose un pourcentage obligatoire de contenu recyclé. Il est question de 25 % pour les plastiques, dont un quart en circuit fermé. Les possibilités pour l’acier sont encore à l’étude. Pour l’aluminium et les autres matières premières critiques, une étude de faisabilité est à l’ordre du jour. « Les objectifs suivront. Lorsque nous aurons terminé notre inventaire du marché et nos simulations, nous pourrons concrétiser le tout au travers d’une législation secondaire », explique M. Pellegrini. Autre point d’attention dans le cadre de la conception circulaire : le « design for removal ». En effet, certaines pièces et certains composants devront obligatoirement être retirés des épaves de véhicules. Ce sera notamment le cas des batteries, mais aussi des moteurs électriques. La liste de ces pièces et composants, mentionnée à l’article 30, est l’élément qui a suscité le plus de protestations. « Chaque pièce et chaque composant de la liste a été testé, d’une part, pour déterminer son potentiel de réutilisation et, d’autre part, pour établir l’impact de la collecte sélective sur la qualité du recyclage. En outre, nous avons examiné l’emplacement dans le véhicule et la possibilité d’un démontage manuel. Au sein même de la Commission, les avis concernant cette liste sont partagés. C’est pourquoi la possibilité de travailler avec la technologie du post-broyage reste ouverte pour autant que des performances similaires puissent être atteintes. » Les personnes souhaitant émettre des commentaires à ce sujet ont jusqu’au 20 novembre pour réagir.
Les obligations des constructeurs automobiles s’élargissent elles aussi. Ils devront ainsi déclarer la quantité de matières plastiques, d’acier, d’aluminium, de magnésium et de terres rares recyclés présents dans le véhicule. Cette mise à disposition d’informations supplémentaires devrait aider les consommateurs à faire un choix durable. En outre, cette déclaration des matières présentes peut aider le secteur du recyclage à identifier les pièces et composants de valeur au sein d’un véhicule. La stratégie de circularité constitue une deuxième obligation. Bien que la plupart des constructeurs y travaillent déjà, la proposition de nouveau règlement clarifie les démarches requises : description des procédures de récupération des matériaux, identification des technologies existantes et à venir pour traiter les véhicules hors d’usage, actions prévues et changements à venir dans la conception. M. Pellegrini ajoute : « Par ailleurs, une responsabilité élargie du producteur sera instaurée, laquelle pourra être organisée individuellement ou collectivement. Dans ce contexte, un mécanisme sera mis au point pour répartir correctement les coûts entre les États membres, en fonction de l’endroit où le démantèlement est effectivement réalisé. »
La Commission européenne poursuit un double objectif en matière de collecte et de transformation. Elle entend augmenter à la fois la qualité et les quantités. « Pour parvenir à un flux propre, nous proposons de ne pas mélanger les matériaux provenant des épaves de véhicules avec le flux des DEEE (déchets d’équipements électriques et électroniques) ou des plastiques. Le déversement de fractions non inertes non traitées sera interdit. » Un chiffre a été avancé, mais seulement pour les plastiques : 30 % des matières plastiques des véhicules devront faire l’objet d’un recyclage. Pour encourager la réutilisation, les pièces et composants retirés recevront un étiquetage et une garantie.
Un dernier point d’attention de la réglementation concerne les épaves de véhicules qui disparaissent des radars. « Aujourd’hui, les contrôles aux frontières ne sont pas assez efficaces, ce qui implique que de précieuses matières premières nous échappent en même temps que ces véhicules hors d’usage. » La Commission propose de soumettre les véhicules exportés à un contrôle visant à déterminer s’ils sont encore en état de rouler. Le passage au numérique est envisagé à cet effet. L’idée serait de créer une plateforme centrale pour l’enregistrement des véhicules, plateforme à laquelle toutes les douanes européennes auraient également accès. « Les détails concernant la concrétisation de cette plateforme devront encore être précisés. »
Quel sera le coût de toutes ces mesures ? Qui paiera la facture ? Et quels bénéfices pourra-t-on en retirer ? La Commission européenne a fait le calcul. « Grâce à ces mesures, nous devrions parvenir à réduire de 12,8 millions de tonnes la quantité de CO2 émise dans l’atmosphère, ce qui représenterait une économie de 2,8 millions d’euros. Quelque 5,4 millions de tonnes de matériaux auront une seconde vie grâce à la meilleure qualité du recyclage. De plus, nous devrions récupérer 350 tonnes de matières premières critiques, nécessaires à la construction de notre société neutre en carbone. Le coût net de cet ensemble de mesures s’élève à environ 69 euros par véhicule neuf. C’est l’utilisateur qui devra supporter la majeure partie des coûts (39 euros). Pour le secteur du recyclage, cette nouvelle directive serait justement l’occasion de réaliser quelques bénéfices », conclut M. Pellegrini.